L’expérience en officine de deux étudiantes en pharmacie face à la crise du Covid-19
Acteurs majeurs de la crise Covid-19 depuis quelques mois en France, les étudiants en pharmacie se sont eux aussi mobilisés dans les officines en besoin de renfort.
Chez Apotiko, nous avons voulu donner la parole à ces étudiants en pharmacie, et nous sommes entretenus avec Camille et Marie. Chacune nous a raconté son expérience de travail en officine, entre fatigue et pression, approvisionnement, nouvelle gestion des ordonnances et application des directives. Comment les pharmacies ont-elles vécu la crise, et se sont adaptées pour faire face à l’afflux de patients tout en respectant les règles d’hygiène imposées ?
Un témoignage privilégié et inédit sur la crise sanitaire vécue depuis l’intérieur de deux officines en France.
Le témoignage de Marie, étudiante de 6e année (filière industrie)
A travaillé dans une officine au Cap-Ferret, en Aquitaine
“Contribuer à ma manière à cette crise, et gagner des sous”
Pour quelle raison es-tu allée travailler en officine pendant la crise ?
J’ai travaillé en officine pendant le Covid-19, car j’ai dû tout d’abord me rapatrier dans ma région d’origine. Vu la situation, j’ai proposé mon aide sur Apotiko, et on m’a vite mise en relation avec une pharmacie qui était débordée et avait besoin d’un étudiant. Cela m’a permis de contribuer à ma manière à cette crise, et avoir un complément de salaire en gagnant un peu de sous.
Avais-tu eu des expériences en officine auparavant ?
Seulement lors de mes stages obligatoires durant mon cursus.
As-tu remarqué des différences avec cette (ces) précédente(s) expérience(s) ?
Face à mes stages que je faisais à peu près pendant cette période, oui, j’ai vu une réelle différence. Il y avait beaucoup de monde, avec toujours les mêmes questions (“Avez-vous des masques, des thermomètres… ?“). La pharmacie durant la période de confinement était un point de référence face aux nouvelles quotidiennes.
Quels changements dûs à la crise as-tu observés dans le quotidien et les activités de l’officine ?
On a observé une augmentation de la prise des médicaments de nos patients, le stress des patients s’est fait sentir… Au sein de la pharmacie, ce qui a été dur, c’était de s’adapter à toutes les actualités de la veille (pas de prise d’AINS, port des gants, mais en fait non, pas de port de masque, et en fait c’est obligatoire…). Mais aussi s’adapter dans nos commandes, il a fallu toujours être à l’affût des nouveaux fournisseurs : d’abord de gel hydro-alcooliques, d’alcool, de masques. Période particulière pour les pharmacies qui étaient le point de repère des patients. Ceux qui se faisaient rares sont alors devenus des patients habituels !
En tant qu’étudiante, quel est ton ressenti par rapport à la crise, et la manière dont les officines se sont adaptées pour la gérer ?
Les pharmacies ont été sous pression pendant toute la période de confinement. La pharmacie dans laquelle je travaille s’est adaptée du mieux qu’elle pouvait. De base, c’est une pharmacie saisonnière, mais beaucoup de personnes sont venues se confiner à côté du bord de mer, donc en plus des besoins dûs au Covid-19, il a fallu gérer une vague de monde inhabituelle pour un mois de mars-avril…
Je pense par contre qu’il y a eu un manque de communication entre les directives prises et ce qui se passait réellement en pharmacie. Les pharmacies se sont adaptées au mieux, mais il manquait à chaque fois le premier maillon de la chaîne… En faisant au mieux, l’impact des directives se ressentait toujours une à deux semaines après (en ce qui concerne l’approvisionnement).
As-tu une anecdote que tu souhaiterais partager ?
Des patients qui ont trop peur… Des patients qui nous remercient d’être là… Des patients qui sont offusqués par le fait que les masques de l’Etat arrivent deux semaines plus tard… Des patients qui se soignent à la Nicorette / Plaquenil car ils ont vu passer des essais cliniques… Des patients (souvent les plus âgés) qui ne mettent pas de masques et qui viennent avec vous derrière le comptoir… Il y en a 100 000 !
Le témoignage de Camille, étudiante de 3e année
A travaillé dans une officine à Ambérieu, en Auvergne Rhône-Alpes
“Je travaillais à la pharmacie alors que les cours continuaient”
Pour quelle raison es-tu allée travailler en officine pendant la crise du Covid-19 ?
Je travaille habituellement dans cette officine tous les samedis depuis le début de ma troisième année, alors quand on nous a annoncé que les cours étaient arrêtés, j’ai proposé mon aide en renfort à ma titulaire, qui a accepté avec soulagement.
Avais-tu eu des expériences en officine auparavant ?
En effet, beaucoup de choses ont changé depuis le début de la crise… Juste avant que le confinement soit annoncé, tous les patients habituels de ma pharmacie se sont rués à la pharmacie pour venir chercher leurs traitements et faire des stocks, de peur que les pharmacies soient fermées également durant le confinement. J’ai donc été obligée de faire le “vigile” les deux premiers jours, pour qu’il n’y ait pas trop de monde en même temps à l’intérieur de la pharmacie. Les choses se sont un peu calmées durant le confinement, et j’ai pu reprendre mes activités habituelles.
Quels changements dûs à la crise as-tu observés dans le quotidien et les activités de l’officine ?
On note notamment des heures de “rush” différentes, avec très peu de monde le samedi comparé à avant, et une très forte affluence aux heures d’ouverture. De plus, la ligne téléphonique est plus surchargée qu’avant la crise pour nous demander de préparer les ordonnances, ou nous demander des masques, du gel hydro-alcoolique… Bien évidemment, les produits de parapharmacie ne sont que très peu vendus maintenant.
En tant qu’étudiante, quel est ton ressenti par rapport à la crise, et la manière dont les officines se sont adaptées pour la gérer ?
Pour moi, les premiers temps ont été très difficiles à gérer. Je travaillais la journée à la pharmacie, mais les cours continuaient. Les profs à l’université de pharmacie ont été compréhensifs en me laissant des délais, mais travailler toute la journée jusqu’à 19h puis ne pas pouvoir manger avant 22h parce qu’on a des TP à rendre, ça donne des journées vraiment longues. C’est probablement mon ressenti le plus important en tant qu’étudiante : la fatigue que génère cette crise… aussi bien physique que morale d’ailleurs. Devoir sans cesse dire aux patients qu’on ne peut par leur donner de masques pour qu’au final, ils soient vendus en grande surface… Devoir sans cesse s’excuser de ne plus avoir de thermomètre en stock, etc. C’est assez fatiguant.
Je pense que la pharmacie dans laquelle je travaille a très bien su gérer malgré les circonstances. Malheureusement, elle n’est pas équipée pour fabriquer de la solution hydro-alcoolique, et les premiers temps de pénuries ont donc été plutôt compliqués à ce niveau. Nous avons également mis en place des guichets en plexiglas pour éviter au maximum les contacts avec les patients.——–
Le témoignage de Camille et Marie, venues en renfort dans des officines de régions différentes, souligne l’investissement et la capacité d’adaptation au pied levé des pharmacies pendant cette période de “rush” due à la pandémie de Covid-19. Toutes deux repartent avec la satisfaction d’avoir contribué à l’effort de guerre tout en gagnant un peu d’argent, et d’avoir vécu une expérience unique en son genre.
Si vous aussi, vous cherchez à remplacer un pharmacien, un préparateur ou à être recruter dans une officine, inscrivez-vous pour être mis en relation avec des pharmacies en recherche d’étudiants !