Les médecins auraient-ils le droit de faire de la publicité ?
Changement de paradigme chez les médecins, suite à un décret publié le 24 décembre 2020 qui abroge le principe d’interdiction de toute publicité au profit du principe de libre communication du médecin sur son activité professionnelle.
Ce décret modifie le code de déontologie des médecins. Le médecin devient « libre de communiquer au public, par tous moyens, y compris sur un site Internet, des informations de nature à contribuer au libre choix du praticien par le patient, relatives notamment à ses compétences et pratiques professionnelles, à son parcours professionnel et aux conditions de son exercice ».
📣 Le médecin peut également « par tous moyens, y compris sur un site Internet, communiquer au public ou à des professionnels de santé, à des fins éducatives ou sanitaires, des informations scientifiquement étayées sur des questions relatives à sa discipline ou à des enjeux de santé publique ».
Ces modifications profondes de la possibilité de publicité pour les médecins ont été provoquées par les sites Internet, par les réseaux sociaux, et par les modes de diffusion de l’information médicale.
Traditionnellement, le médecin est un « taiseux » et ne communique ni sur ses pratiques, ni sur ses compétences. Ceci est bien différent des États-Unis, ou par exemple les médecins ont leur diplôme encadré dans leur bureau !
Jusqu’à présent, les médecins ne communiquent pas sur leur formation ou leurs pratiques professionnelles car il y a des conditions et des limites strictement définies, et aucun média de communication grand public.
Ce nouveau décret est une vraie liberté pour les médecins. La question centrale est ce que devient la relation entre médecins et patients.
Une médecine plus « commerciale » ?
Avec la progression et la diffusion des informations par Internet, les médecins ont presque le devoir de s’adapter aux nouvelles technologies numériques. De plus, les médecins français doivent s’harmoniser avec les professionnels européens pour lesquels la publicité est autorisée.
Il faut retenir la possibilité d’expression du médecin sous forme de publicité reste dans le respect de ses obligations déontologiques. N’oublions pas qu’en France, la réglementation allait jusqu’à encadrer la dimension des plaques apposées à l’entrée d’un cabinet !
La réflexion centrale est éthique afin que la médecine ne devienne pas un commerce. Toutefois, avec le déploiement de la téléconsultation payante, du secrétariat connecté payant, l’évolution de la société impose des changements fondamentaux, voire fondateurs, de la communication des médecins auprès du public.
Avec la crise sanitaire, la médiatisation croissante des professionnels de santé a montré l’intérêt de ceux-ci pour les médias. Cette communication libre permet d’avoir accès au principe du libre choix du praticien par le patient. Pour avoir un choix, il faut que le patient dispose d’une information fiable publique sur le praticien. Grâce à ce décret, les patients vont pouvoir accéder à des informations de compétences, de pratiques professionnelles ou de parcours de leurs praticiens.
Qu’est-ce que la publicité pour un médecin ?
Une première définition proposée est une présentation avantageuse du médecin, de ses méthodes, de ses compétences et de ses spécialités.
L’écueil à éviter se situe entre le souci d’information et la vulgarisation d’une publicité dite mensongère. On reste toujours à la limite médecine commerce.
Il faut donc bannir la publicité consumériste. Il n’y a toujours aucune autorisation de montrer un patient avant et après traitement, car le médecin n’a pas une obligation de résultats, mais de moyens.
L’idéal est d’arriver à donner des informations pertinentes pour la prise en charge des patients, mais non sur la performance. Toutefois, les médecins peuvent mettre en avant les outils utilisés pour mieux prendre en charge leurs patients.
Les principes de base de communication d’un médecin sont d’avoir :
- des données communiquées vérifiées
- la prudence dans l’expression
- le désintéressement de la pratique afin de ne pas assimiler cette communication à de la publicité commerciale
Chaque médecin trouvera son équilibre.
L’article 41 27–19–1 explique : « La communication respecte les dispositions en vigueur et les obligations déontologiques définies par la présente section. Elle est loyale et honnête, ne fait pas appel à des témoignages de tiers, ne repose pas sur les comparaisons avec d’autres médecins ou établissement et n’incite pas à un recours inutile à des actes de prévention ou de soins. Elle ne porte pas atteinte à la dignité de la profession et n’induit pas le public en erreur. » À « loyal et honnête », on rajoute « prudent ».
La communication a toutefois des limites.
Le conseil National de l’Ordre des Médecins met en ligne des recommandations qui ont pour objet d’expliciter de façon très pratique ce qui est conseillé aux médecins comme information à mettre à disposition du public, à la fois pour ces informations et ces pratiques personnelles, mais également sur son parcours professionnel et ses conditions d’exercice.
💡 À l’heure actuelle du déploiement des réseaux sociaux et de Internet, l’information du patient pour choisir son praticien doit être éclairé. La meilleure des informations est celle donnée par le praticien lui-même. En effet, les patients ont tendance à aller chercher des informations sur Internet qui ne sont ni justes ni justifiées, parfois même délétères dans leur relation avec leur praticien. La limite à éviter est l’auto-promotion du praticien ou du cabinet. Le médecin peut expliquer ce qu’il fait sans être taxé de publicité.
Comment communiquer sur son activité de médecin ?
Il est recommandé de ne diffuser que les éléments essentiels de son parcours professionnel pour l’information du public. La communication peut se faire par :
- 🖼 une photographie, ou la photographie de son cabinet
- 📅 l’âge et la date de naissance
- 📲 les réseaux sociaux éventuellement pour se retrouver
- 📍 le lieu de naissance
- 📋 le numéro d’inscription à l’ordre des médecins et tout numéro d’identification professionnelle
- 📖 le lieu et les établissements universitaires de la délivrance de diplôme permettant d’exercer
Dans les informations, peuvent également être inscrits les stages, le déroulement de la vie professionnelle avec les lieux d’exercice et des fonctions assurées, en particulier les fonctions hospitalo-universitaires.
La communication peut également être axée sur le déroulement de la vie professionnelle avec les postes occupés, les missions confiées et les publications réalisées.
La communication peut également se faire sur les langues parlées, l’adhésion à des sociétés savantes, les distinctions honorifiques. Les informations pratiques du cabinet sont déjà mises en place ainsi que les informations pour la prise de rendez-vous. Le médecin peut également expliquer son mode d’exercice et ses honoraires.
Lors de la communication sur les pratiques professionnelles, les différentes orientations ne doivent pas prêter confusion avec d’autres spécialités médicales, comme par exemple gynécologie et pédiatrie pour un médecin généraliste.
Il est intéressant de communiquer sur la participation à des actions de santé publique ou à des réseaux de soins organisés par des établissements ou des professionnels de santé.
Tous forme de supports de diffusion est possible avec des photos, des vidéos, des informations à finalité scientifique, des publications.
Des limites et interdictions persistent…
⚠ Il faut bien respecter les obligations déontologiques et le secret professionnel. Il est strictement interdit de communiquer sur les patients.
👉 Les autres éléments qu’il faut manipuler avec beaucoup de prudence sont les remerciements et témoignages de patients. Ce qui est proscrit sont les notations, évaluations et commentaires. Les photos avant et après une intervention sont strictement interdites : on rappelle que le médecin a une obligation de moyens et pas de résultats.
🚫 D’autre part, des comparatifs entre les délais de prise en charge, les tarifs ou les actes pratiqués par d’autres médecins ou d’autres établissements sont à proscrire.
🚫 Il est également strictement interdit de mentionner les résultats ou l’absence de plainte de patients, ou de poursuites disciplinaires ou de sanction.
On peut espérer faire confiance au corps médical qui limitera les abus, les manquements et les fausses informations afin de limiter la course à une notoriété factice. Ce nouveau décret répond à un besoin d’informations et de pédagogie des patients qui aurons accès à de vraies informations rédigées par leur praticien.
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